Le goudron
Comme nous le savons probablement tous, la fumée de cigarette contient d'innombrables substances toxiques. La première substance nocive qui nous vient à l'esprit quand on parle de la toxicité de la cigarette est, bien entendu, la nicotine. Cependant, des substances encore plus nuisibles que la nicotine sont souvent oubliés, comme les goudrons. Le « goudron » du tabac est le nom donné à l'ensemble de la matière dans la fumée de cigarette après l'extraction de la nicotine et de l'humidité (des particules d'eau). Bref, la majorité des agents cancéreux dans la fumée du tabac sont regroupés sous le nom de goudron.
Premièrement, le goudron est responsable de plusieurs maladies. Par exemple, on pense aux tumeurs causées au niveau des poumons, au lymphosarcome, à la leucémie et au réticulosarcome. De plus, il ne faut surtout pas oublier qu'ils sont les agents initiateurs de nombreux cancers. Il est scientifiquement démontré que l'usage du tabac constitue un facteur significatif dans l'apparition ou le développement d'un cancer du larynx. Aussi, les scientifiques en sont venus à l'évidence de la possible association entre le tabac et le cancer de l'œsophage. Également, il y aurait un risque relatif beaucoup plus élevé de développer un cancer du pancréas chez les fumeurs que chez les non-fumeurs.
Deuxièmement, plusieurs scientifiques ont effectué des expériences pour démontrer la toxicité du goudron dans les cigarettes. Certains chercheurs ont découvert que des injections sous-cutanées des goudrons de cigarette à des souris naissantes ont produit des tumeurs bénignes et malignes au niveau du foie, des poumons et des tissus lymphoïdes. Dans une étude menée chez des hamsters, les professionnels ont trouvé des changements dysplasiques dans le larynx après 40 semaines d'exposition à la fumée de cigarette. Au cours de cette même étude, des changements néoplasiques ont été détectés au niveau du larynx après 80 semaines d'exposition. Ensuite, une autre étude, effectuée chez les cochons d'Inde, a démontré une augmentation du nombre de macrophages après 2 à 4 semaines d'exposition à la fumée du tabac. Aussi, toujours dans cette même étude, les chercheurs ont observé une diminution du nombre de cellules pulmonaires, une grande corrélation entre l'acétaldéhyde et le goudron et une diminution du nombre de leucocytes. D'autres spécialistes ont démontré une augmentation significative du nombre de leucocytes polymorphonucléaires, retrouvés dans les poumons des cochons d'Inde, en réponse à l'exposition de la fumée de cigarette durant une période de 10 semaines. Les auteurs de l'étude ont suggéré, si ces observations sont applicables à l'homme, qu'une source d'enzymes protéolytiques, à des concentrations élevées, se retrouvent continuellement dans les poumons des fumeurs. Il va sans dire que l'effet dépresseur de la fumée du tabac sur les défenses respiratoires naturelles de l'organisme laisse le système de plus en plus susceptible aux infections bactériennes, par exemple.
Dans un troisième temps, étudions comment le goudron agit sur notre organisme. Les hydrocarbures aromatiques polynucléaires, que nous aborderons plus loin, sont connus pour être des initiateurs de tumeur. Ces composés particuliers sont cancérigènes, même à des doses de quelques microgrammes. Les initiateurs de tumeur provoquent des changements dans les cellules cibles, particulièrement dans l'ADN. Les promoteurs de tumeur sont des agents qui promeuvent la transformation néoplasique des cellules qui ont été activées par les initiateurs de tumeur. Pour ce qui est du goudron de cigarette, sa partie neutre, ses deux sous parties neutres et sa partie acide faible sont soit des initiateurs ou des promoteurs de tumeur. Maintenant, voici comment, en général, le goudron peut induire des modifications au niveau de l'ADN.
Figure 1 : Mécanisme général d'action du goudron sur l'ADN
On peut constater, d'après ce schéma, que c'est ironique que le même processus d'oxydation qui désintoxique l'organisme des substances chimiques dangereuses peut aussi créer des métabolites qui sont beaucoup plus cancérigènes que les hydrocarbures eux-mêmes. Il va sans dire que les composés mutagènes sont souvent identifiés comment étant cancérigène, car ils bloquent et mettent hors fonction le processus génétique dans les cellules. La chimie qui se cache derrière les modifications de l'ADN engendrée par le goudron fait intervenir la réactivité des oxyranes envers les nucléophiles, sachant qu'il y a beaucoup de sites nucléophiliques sur l'ADN.
Enfin, voyons les hydrocarbures, substances que l'on retrouve dans le goudron du tabac. Tout d'abord, les hydrocarbures aromatiques polynucléaires ainsi que les hydrocarbures N-hétérocycliques, faisant partie du goudron, sont les principaux éléments cancéreux de la fumée de cigarette. En effet, une concentration élevée d'hydrocarbures aromatiques polynucléaires, représentant 0,6% de tout le goudron, représente la fraction la plus cancérigène de toute la fumée du tabac. Par exemple, une préparation concentrée d'hydrocarbures aromatiques polynucléaires provoque des changements cytologiques significatifs au niveau de la trachée de la souris et sur le foie fœtal humain lorsqu'on fait croître ce dernier dans une culture d'organes. Dans une expérience, des chercheurs ont démontrer que, dans le goudron de la fumée du tabac, seulement sa partie neutre ainsi que ses deux sous parties neutres sont actives comme cancérigène et comme des initiateurs de tumeur. Dans toutes les parties du goudron de tabac, seulement la partie acide montre une activité significative de promoteur de tumeur. De plus, les concentrations relativement grandes de méthylfluoranthène actif dans le goudron suggère que ces alkylfluoranthène contribuent à l'activité d'initialisation de tumeur dans la fumée de cigarette. Dans un autre ordre d'idée, après avoir isolé avec succès deux parties des nombreux constituants de la fumée de cigarette, c'est-à-dire les ligands protonés (II-F2) et les ligands non protonés (II-F3), ces deux parties, joint à une partie contenant du cuivre, ont été testés pour l'activité inhibitrice envers la catalase, la galactose oxydase et la glucose oxydase. La galactose oxydase et la catalase sont des métalloenzymes et la glucose oxydase est une glycoprotéine contenant la flavine-adénine dinucléotide et aucun métal. Les parties II-F2 et II-F3 inhibent fortement la galactose oxydase (une enzyme contenant du cuivre), tandis qu'ils n'affectent pas la glucose oxydase. Les ligands protonés (II-F2) et leur complexe de cuivre inhibe la catalase, mais les ligands non protonés (II-F3) n'ont aucun effet sur cette enzyme. De plus, le cadmium et le nickel dans la fumée de cigarette représentent un danger aussi bien pour la santé des fumeurs que des non fumeurs. Aussi, le nickel agit comme un agent cancérigène en inhibant l'induction de la benzopyrène hydroxylase pulmonaire, une enzyme qui converti le 3,4-benzopyrène en dérivés hydrolysés non cancérigènes. Enfin, comme on peut le constater, le goudron agit sur quelques enzymes, en inhibant leurs fonctions essentielles, ce qui mener éventuellement à l'apparition de cancers et de tumeurs.
En somme, le goudron du tabac est un élément très nocif pour notre organisme et il est souvent à l'origine de plusieurs cancers et tumeurs, soit en agissant directement au niveau de nos cellules ou sur certain de nos enzymes.